J’intervenais hier au Forum Ashoka de la Co-Création Social & Business et voici les messages clés que j’ai partagés, ouverts ici au débat avec tous ceux qui n’y étaient pas :
Co-création : le contexte (1)
De nouvelles logiques économiques
Les réflexions sur la co-création sont à resituer dans celles, foisonnantes, sur l’open innovation, la juggad et la reverse innovation, l’entrepreneuriat social, le social business, le BoP, l’économie collaborative. Ces tendances à rapprocher montrent le franchissement d’un cap de maturité pour de nouvelles formes de création et de partage de la valeur, avec une vision intégrée et systémique des différentes phases de la chaîne de cette valeur, en interaction avec de multiples parties prenantes.
Cela n’a plus rien à voir avec des logiques d’organisations bien-pensantes : ce discours s’exprime dans de plus en plus de milieux, parce que ces nouvelles formes de création de valeur sont comprises comme des questions de pérennité, voire de survie, pour les entreprises. Et ainsi sur les problématiques sociales, on observe un saut d’un traitement très à la marge du « social » (vu comme une externalité) à une logique de synchronisation, d’hybridation entre business & société. Il s’agit là de faire de la question sociétale un objet (impact social) mais aussi une source d’inspiration qui vient stimuler et orienter l’exploration de nouveaux champs de valeur. Cette approche naît d’une prise de conscience, enfin mûre, des interdépendances entre les champs économiques et sociaux, de la compréhension fine du business comme un processus socialement encastré. L’expérience BoP a été très intéressante en cela pour faire comprendre que la question de la pauvreté permettait d’entrevoir de nouveaux marchés, même si c’est extrêmement compliqué ; que la médiation sociale, pratiquée par des associations et acteurs du champ ‘social’, est une façon originale d’écouter les besoins et les attentes des consommateurs pour les entreprises de tout secteur.
L’apprentissage dans l’écosystème, valeur stratégique
Les projets de business inclusif sont un véritable laboratoire d’innovation pour les entreprises, notamment pour le renouvellement de leurs compétences et de leurs connaissances. Ceci est une production à part entière à valoriser et à exploiter. La dimension d’apprentissage est en effet extrêmement importante pour les entreprises – elle l’a toujours été mais elle revêt une intensité et une actualité nouvelles avec le nouveau paradigme économique que l’on vit aujourd’hui. Ce dernier n’est plus du tout celui décrit par M. Porter autour de l’avantage concurrentiel, mais celui de la compétition par l’innovation, où ce qui est décisif c’est la capacité dynamique des entreprises, leur capacité de transformation, très liée elle-même aux effets de réseaux, aux inter-relations dans l’écosystème, et par extension à une dynamique d’inclusion. Cette flexibilité devient une condition de pérennité des firmes. Comme le disait le Président d’IBM France à une conférence organisée aux Mines, « toutes les entreprises doivent avoir des scénarios de transformation et s’auto-remettre en cause en permanence. Le changement de business model est vital ». Mais au-delà des mutations technologiques, se saisir des mutations sociales comme agent de transformation du business model est fondamental pour l’avenir des entreprises.
La COmmunauté, l’avenir de l’innovation
On entend aujourd’hui beaucoup parler d’écosystème. De quoi parle-t-on ? J’aime cette expression des anglo-saxons qui parlent de flux « outisde-in » et « inside-out », c’est à dire du fait que l’’innovation passe de plus en plus par le recours aux réseaux externes et dans des interactions avec des acteurs très différents. Les pratiques de co-innovation se multiplient : crowdsourcing, « disruption systémique », innovation ouverte… car aujourd’hui, comme le dit Chris Anderson dans son livre Makers, « la communauté est l’avantage concurrentiel » ! Cela est très vrai dans l’open software mais la transposition est intéressante dans l’univers hors IT, si on prend le cas de l’automobile avec Wikispeed par exemple. Dans les nouveaux modèles économiques, la différence ne se fait plus tant dans les biens que dans les liens que l’entreprise crée entre elle et les gens. De façon croissante, l’échange économique capitalise sur ces va-et-vient entre sphère marchande et non marchande, sur la proximité et le contact étroit avec les clients (user-centered, user-experience) et les parties prenantes, sur des organisations en réseaux, des fonctionnements en communauté.
A venir : Co-création : les barrages (2) & les leviers (3) ! A très bientôt !